Des exodes espagnols des années 1936 à 1960,
aux politiques d'accueil de l'Etat français, d'hier à aujourd'hui.
Geneviève
Dreyfus Armand, spécialiste de l'exil républicain espagnol, a fasciné
les 80 personnes présentes par sa magistrale présentation des différents
exodes qui ont eu lieu pendant la guerre d'Espagne de 1936 à 1939. Elle
a souligné la guerre d'extermination mené par Franco contre les
partisans de la République espagnole et de la démocratisation. Geneviève
a décrit aussi les différentes vagues migratoires avec leurs
spécificités, des années 1920 aux années 1930.
Si le Droit
d'asile existe depuis 1793, il est appliqué d'une manière très inégale
et arbitraire au gré des politiques économiques et sociales des
différents gouvernements. Le 14 avril 1938, le gouvernement Daladier
marque la fin du Front Populaire et entraîne une politique beaucoup plus
répressive envers les Réfugiés. En mai 1938, est mise en place la
Police des étrangers. Geneviève Dreyfus Armand a expliqué les
fluctuations des politiques envers les internés. Ils sont utilisés
d'abord comme main d’œuvre pour les travaux agricoles ou industriels,
puis enrôlés aux CTE, compagnies de travailleurs étrangers puis aux
GTE, groupements de travailleurs étrangers, participants à l'effort
guerre, et souvent le retour à l'enfermement pour ceux jugés très
dangereux parmi les Indésirables et renvoyés dans leur pays où ils sont
en danger !
Grégory Tuban, historien
référent sur le camp de concentration d'Argelès-sur mer, a enchaîné sur
le virage sécuritaire de 1938. On assiste alors à la pénalisation du
Droit des étrangers, avec assignation à résidence etc. Tous les
Espagnols ont été fichés dans un fichier central, qui sera récupéré par
les nazis. Mêmes modèles de fichiers, même fonctionnaires. Et une
tradition républicaine, on envoie les indésirables en Afrique du nord.
Fin 1943, fin de l'internement massif des étrangers en France sauf au
camp de Gurs. En 1944 De Gaulle autorise les préfets à interner les
personnes jugés dangereuses !
Odette Martinez
Maler, historienne, spécialiste des Républicains espagnols qui ont
continué la lutte anti franquiste sous Franco, comme son père. Elle a
décrit avec précision et passion le sort particulièrement dramatique des Guérilleros qui ont dû se battre pour avoir le statut de réfugiés
politiques. Arrestations, reconduites à la frontière, telle a été leur
sort , ils ont été reconnu comme résistant en 1949 et après comme
terroriste !
Annalisa Lendaro,
sociologue, s'est intéressée aux réfugiés d'aujourd'hui
particulièrement de la frontière italienne à Ventimille. Elle a parlé
de frontière biopolitique, outil de séparation entre 2 territoires,
outil de filtrage des populations, de bannissement et d'éloignement, de
hiérarchisation "d'indésirabilité". Les technologies d'identification
sont devenues très performantes et on ne lésine pas sur les moyens
financiers...Depuis 2015 l'union européenne protège leurs frontières
nationales et leurs prérogatives plutôt que le Droit d'asile : accords
UE/Turquie, mur en Hongrie, accord avec l'Autriche...On protège les
frontières plutôt que les hommes. Annalisa Lendaro met en avant le
concept d'hospitalité, comme éthique de soi-même contre les politiques
de L’état qui utilisent les menaces terroristes pour légitimer le
contrôle des étrangers demandeurs d'asile, en pratiquant le contrôle
d'identité au faciès. Elle oppose légalité et légitimité.
Petit aperçu très incomplet d'un colloque passionnant qui nous a alerté sur les continuités et les dérives de l’état répressif.